Une décennie après le creux de la crise financière de 2008-2009, quelles leçons avons-nous retenues ?
Sébastien Galy, Senior Macro Strategist chez Nordea Asst Management
La grande crise financière nous a fait prendre conscience de la complexité du système financier mondial. Beaucoup de monde était convaincu de l’arrivée d’une crise, mais l’ampleur des effets de levier et des interconnexions a surpris beaucoup d’entre nous. La réglementation avait permis de mettre au point des produits à fort effet de levier difficiles à valoriser, laissant les banques porter dans leur bilan des actifs de mauvaise qualité résultant d’activités de trading, de hedging et d’investissements risqués. Dans certains cas, il faudra encore des années pour éponger les pertes liées à ces créances irrécupérables, du fait que les régulateurs découragent désormais la détention d’actifs complexes à fort effet de levier et ont renforcé les exigences de liquidité. En conséquence, certains produits très complexes ont disparu tandis que certaines activités ont été transférées à des acteurs du shadow banking pour externaliser les risques.
La Fed, la BCE et les autres banques centrales sont intervenues pour soutenir l’économie et absorber les risques. Elles ont mis en place des programmes d’assouplissement quantitatif et ont parfois abaissé leurs taux directeurs en allant en territoire négatif. La pile de dettes et de crédit immobilier qui en résulte rappelle l’éclatement de la bulle immobilière japonaise. Tant que les banques centrales parviennent à maintenir un rythme de croissance décent, ces bulles potentielles devraient se dégonfler de manière gérable, comme c’est le cas aux États-Unis. Cependant, le risque est que les taux bas conduisent certains pays, tels que l’Italie, à ne pas se réformer avant qu’il soit trop tard, ce qui risquerait d’entraîner une réapparition du risque souverain.
Au cours des dix années qui ont suivi la chute des marchés, nous avons acquis de puissants outils de politique monétaire (assouplissement quantitatif, forward guidance, etc) qui ont permis de soutenir l’économie mondiale. Le danger réside désormais dans les conséquences encore inconnues des outils qui ont été ou seront introduits, y compris l’instauration d’un objectif d’inflation temporairement plus élevé.